« On a toujours le choix. On est même la somme de ses choix. » Joseph O’Connor
bonjour,
La mode de la méditation fait penser à beaucoup de ceux qui la pratiquent, qu’ils suivent une voie spirituelle laïque et que le bonheur et la libération de la souffrance sont, grâce à cette unique méthode, au bout du chemin. Mais, il n’en est rien. Suivre une voie spirituelle, est une approche exigeante, implacable, qui confronte quotidiennement à l’expérience sans concession et souvent douloureuse, au début, du réel. Mais, c’est ce face à face absolu, unique, avec soi-même, qui amène et oblige le disciple à laisser tomber masques, illusions, faux-semblants et lui apprend à vivre en union totale avec son expérience, sans éprouver de peur, et de plus en plus sereinement. Sur ce chemin, la méditation est une méthode parmi bien d’autres qui aide le disciple à avancer, à transformer, à amadouer, à pacifier, le mental et l’ego; à se mettre à nu symboliquement; à déployer son cœur, sans peur; et à devenir lucide.
En ce qui me concerne, sur cette Voie, mes rencontres avec Arnaud Desjardins, mes maîtres tibétains : Sa Sainteté le Dalaï Lama, Tulku Pema Wangyal, le vénérable Dagpo Rinpotché, Trulshik Rinpotché… et des pratiquants comme Ani Patchen, Matthieu Ricard, Gérard Godet, Yanhe le Toumelin, Marie-Stella Boussemart, Catherine Despeux, Christophe Massin, contribuèrent à changer foncièrement ma vision du monde. Mais, ne nous leurrons pas. Contrairement à celui des thérapeutes, le rôle des maîtres, toutes traditions confondues, n’est pas de réparer les manques et les blessures de l’enfance. La transmission spirituelle relève d’un autre ordre. Khandro Rinpotché, l’une des rares femmes maîtres bouddhistes, dit en substance à ce propos : « Le bouddhisme n’est pas là pour soigner les plaies du cœur. Si vous avez mal à la tête, vous prenez une aspirine et vous pouvez ensuite vous atteler à des tâches qui sont pour vous essentielles. Si vous avez des problèmes affectifs, soignez-vous avant d’apprendre et de pratiquer le bouddhisme. S’engager sur la Voie bouddhique ne consiste ni à suivre une thérapie, ni à expérimenter des méthodes de bien-être. Le bouddhisme vise à réaliser l’éveil, c’est-à-dire à se libérer de toute identification à la souffrance. Ce qui demande un entraînement quotidien de l’esprit… ». De manière moins directe, tous les maîtres enseignent ce principe. Mais la plupart des Occidentaux, en quête désespérée de solutions qui les aideront à résoudre sans attendre leurs problèmes et à se sentir rapidement mieux, dans ces sociétés de consommation qui les vampirisent, n’entendent pas ces paroles de sagesse. Ils s’arrêtent au sourire et à la sérénité éclatante du Dalaï Lama et des maîtres tibétains. Ils ignorent les années d’efforts et de rigueur qui leur furent nécessaires pour atteindre cet état apparent de paix intérieure. évolution repose sur des apprentissages, plus ou moins longs selon les individus, qui obligent à suivre une discipline afin d’accéder à un savoir qui s’adresse à la fois au corps, à l’intellect, au cœur et à l’esprit.
En ce qui me concerne, ce parcours m’a demandé du temps, déjà près de 40 ans, de la patience, des efforts constants, du courage, de la volonté. Aux larmes et aux chutes ont toujours succédé pour moi, la nécessité vitale et urgente de me relever, pour ne pas demeurer à terre, et m’y laisser mourir. Mon chemin est loin d’être achevé. Je le sais. Mais je sais aussi maintenant que ce chemin n’est pas fait pour les gens pressés. Non, il est destiné à ceux qui acceptent l’idée que toute transformation, quel que soit le but recherché, demande du temps et de pratiquer avec constance certaines méthodes. Ces propos, loin de se vouloir pompeux ou décourageants, témoignent de la prise en compte de ce qui nous relie tous et qui participe à construire la trame commune sur laquelle nous édifions nos existences : notre humanité. Notre humanité ordinaire, faite de hauts et de bas, d’espoirs et d’illusions déçus, du tumulte de nos émotions, des peurs que nous rencontrons, de nos forces et de nos faiblesses, de nos aptitudes et de nos talents.
Les apprentissages proposés par toute voie spirituelle authentiques, permettent de passer peu à peu de la survie à la vie, en apprenant à respirer, à accepter, à comprendre, à temporiser, à se détendre, à prendre du recul, à être heureux ou pas selon les moments, sans que cela ne pose de problème. Bref, à vivre. Ce qui se manifeste notamment par un changement progressif mais radical dans la manière d’appréhender les choses. Ainsi, en ce qui me concerne, tout au long de ce périple, ponctué de doutes, de certitudes, de remises en question, de lâchers-prise, de renoncements, d’incompréhensions, de violentes impressions de non-sens et d’absurdité, cette progression intérieure que j’estimais, au début, inconsciemment, en termes de gain et de perte se transforma peu à peu en avancées, justes ou non. Ce qui est loin d’être anodin. Passer en effet d’une position où tout est comptabilisé en bien ou en mal, à un état où les événements sont simplement reconnus pour ce qu’ils sont, sans jugement, sans culpabilité, participe à changer foncièrement la posture que nous adoptons face à l’existence. La vie peut alors nous habiter, telle qu’elle est, « une sans un second »**, car nous cessons de projeter en permanence nos peurs, nos désirs, nos rêves, nos faiblesses, destinés à nous rassurer et à recoller les morceaux de notre être intérieur brisé par les manques de l’enfance. Grâce à cela, nous retrouvons le lien avec notre profondeur. Nous pouvons, peu à peu, nous ouvrir, sans crainte, à l’inattendu, à la beauté et à la plénitude incroyable du présent. Et, cesser de faire des séparations entre ce qui est, ou non, spirituel, aimable ou pas, digne ou non d’intérêt, bien ou pas. Car il nous vient alors l’intime certitude que tout, absolument tout, compose fondamentalement le repas de notre existence.
Que votre vie soit belle et douce.
Qu’ajouter de plus, c’est tellement vrai, la vie s’invente au quotidien…je pense même que nous ne nous incarnons nulle part par hasard, soyons ouvert à ce qui résonne profondément en nous… notre incarnation est un terreau fertile si nous l’alimentons dans notre quête d’unité avec le vivant…
Bien amicalement Catherine,
Dominique