Fêter nos morts pour vivre et mourir en paix

La Toussaint, fête des morts dans l’Occident Chrétien, était destinée autrefois à fêter nos ancêtres et amis défunts, comme cela se fait toujours en Asie au moment des fêtes traditionnelles dédiées aux morts. Chaque année, les familles et proches des disparus se retrouvaient, en général autour d’un bon repas, non pour les pleurer mais pour se souvenir avec bonheur de celles ou de ceux qui manquait à l’appel.  Le lien d’amour, d’affection, de tendresse, de gratitude pour les bons moments partagés, tissé entre les participants au cours de ces agapes, rendait la mort moins absurde puisqu’au-delà des corps retournés à la terre, la personnalité, l’âme du disparu restaient vivantes dans les cœurs de ceux qui demeuraient encore.
Mais, depuis la moitié du XXème siècle,  nos sociétés de consommation aseptisent nos vies en nous poussant à acheter toujours plus et bien des choses superflues. Consommer rassure mais jusqu’à un certain point seulement car nous restons mortels et nous ne pouvons l’oublier. La mort, autrefois phénomène naturel dont la prise en compte aidait nos aïeux à mettre leurs existences et actions en perspectives, à introduire une profondeur de champs dans leurs méditations, à réfléchir, et sans doute à mieux aimer, s’est délestée ces dernières décennies du sens qu’elle véhiculait. En oubliant le sens de la mort, ce qu’il dit de nous et de notre finitude, nous avons perdu celui de la relation à soi et à l’autre et construit des univers d’immenses solitudes et égoïsmes.
Le bouddhisme prépare, à chaque instant, à mourir en paix. La mort est l’une des questions centrales de cette tradition. Jusqu’au dernier moment et l’ultime pensée, nous pouvons nous transformer et mourir sereinement, ce qui prépare à de meilleures renaissances, affirment les maîtres. Ainsi comme le dit l’enseignant bouddhiste Fabrice Midal : « Penser à la mort, donner droit à la mort, nous ancre immédiatement dans l’essentiel. Il n’y a là rien de morbide. Ce qui est morbide c’est non pas de parler et de penser à la mort, mais de s’abrutir de divertissements qui nous font croire que la mort ne nous concerne pas. C’est un égarement malheureux ! Nous allons mourir. Autant le reconnaître et du coup vivre vraiment ! Il est important d’oser parler de la mort. »
Chaque instant est précieux, unique, essayons de l’incarner en mettant la vie et la mort en perspective. Cette confrontation avec notre mortalité est le cœur des religions, et des spiritualités. Elle accompagne la peur de l’impermanence des êtres en les aidant à se projeter dans des mondes dont nul pourtant ne peut certifier l’authenticité. Croire est une grâce qui transcende les réalités de la souffrance, de la maladie, de la vieillesse, de la perte. C’est aussi une bénédiction qui s’ancre dans une morale quotidienne partagée par une communauté.  Reste que croire ne suffit pas toujours pour accepter de disparaître à jamais de ce monde. En revanche, aimer aide à avoir moins peur de vivre et de mourir. L’effroi de l’inconnu diminue voire s’efface quand, au moment de mourir, on est entouré par ceux qu’on aime.
Bonnes fêtes de la Toussaint
Belle route à tous
Soyez heureux

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