La Toussaint : l’occasion de repenser la mort et les veillées funéraires

Bonjour à tous,

crémation

La mort est la question bouddhiste par excellence. De manière générale, elle est au cœur de la vie des asiatiques alors qu’en Occident, nous la rejetons de nos quotidiens. Nous en nions ses manifestations que sont notamment la vieillesse et la maladie. Nous refusons de nous y confronter, de l’accepter,  de l’accompagner comme un élément normal et essentiel de nos existences, et nous perdons ainsi un repère déterminant pour mener nos vies en prenant la profondeur de champs nécessaire. Ce dénie de la mort  participe à accroître la perte de sens que de plus en plus d’individus ressentent dans nos sociétés et la propension des européens à l’anxiété, au désarroi, à la violence.
Autrefois, les veillées funéraires,  en ville et dans les campagnes, permettaient de dire au revoir à ceux qui nous quittaient et de partager avec ceux qui venaient se recueillir autour de la dépouille du mort, le violent sentiment d’impermanence que chacun éprouvait à cette occasion. Cet espace donné au partage, à la réflexion, à la méditation, était une occasion de réfléchir aux valeurs qui nous semblaient importantes,  à nos relations aux autres, à la manière dont nous menions nos vies avec plus ou moins de bonheur. Il y avait de la peine bien sûr autour du cercueil, de l’hypocrisie parfois également, mais aussi des sourires et de grands moments d’émotions quand on se souvenait des échecs, joies, réussites, rires, partagés avec le défunt. Adultes, enfants, familles, amis, voisins, y participaient selon leur disponibilité et se construisaient en intégrant cette réalité.

Aujourd’hui, en Occident, la mort est globalement refusée symboliquement dans la plupart des milieux alors qu’en Asie et dans le bouddhisme, l’idéal est de mourir en pleine conscience, en étant à même de faire de cette expérience un moment d’ouverture, de lâcher-prise, d’éveil pour soi comme pour ceux qui sont présents. Accompagner quelqu’un qui nous quitte ainsi est un formidable cadeau. Je l’ai vécu auprès de grands pratiquants et c’est pourquoi je milite pour que nos malades, nos vieux, puissent mourir chez eux, à la maison, chaque fois que c’est possible. Pour qu’ils soient entourés jusqu’au bout, avec tendresse et affection, par leurs proches. Pour que ceux qui le souhaitent participent à cette dernière aventure de la personne aimée car cette expérience change profondément ceux qui la vivent.

La mort ne doit plus être taboue. Nous devons réapprendre à accompagner nos proches,  à ne pas la craindre, à nous comporter au plus juste de ce que demandent ces moments. Trop souvent nous nous comportons avec trop peu d’humanité vis-à-vis de ceux qui partent.  Les accompagner c’est célébrer la vie, c’est refuser la peur, c’est se donner les moyens de s’accomplir plus pleinement. Car, donner droit à la mort, nous ancre dans l’essentiel. Comme le dit Fabrice Midal, fondateur de l’école Occidentale de médiation : « Une vie qui renie la mort manque à l’illimité qui est le sien. La vie et la mort ne sont nullement deux entités qui s’opposent, elles sont les deux pôles d’une même figure. »
Le grand poète Rainer Maria Rilke rejoint cette analyse bouddhiste et offre une méditation de la mort d’une grande ampleur. Pour lui, une mort manquée est une mort qui vient surprendre l’homme et ne dit rien de lui. La grande mort en revanche est celle qui est personnelle, protégée, aimée, attendue parce que l’œuvre suprême. Je lui donne la parole pour conclure:

« Seigneur, donne à chacun sa propre mort
Qui soit vraiment issue de cette vie
Où il trouvera l’amour, un sens et sa détresse »
(Le Livre de la pauvreté et de la mort)

Belles fêtes de la Toussaint

Belle route.

Soyez heureux et offrez ce bonheur à vos proches.

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